- Pablo Burtovoy, ancien gardien de but, a passé ses 21 années de football professionnel dans des clubs d'Amérique latine, en jouant dans des pays comme l'Argentine, le Mexique, la Colombie, la Bolivie, le Chili, le Venezuela et le Pérou.
- Il est maintenant Directeur de l'éducation pour la FIFPRO Amérique du Sud
- Il a joué un rôle décisif dans le développement de la campagne « Back to School », qui encourage les joueuses et joueurs d'Amérique du Sud à poursuivre ou à reprendre leurs études, parallèlement à leurs activités sportives
« Je dois admettre que j'ai de l'espoir. Heureusement, l'éducation dans le football est un mouvement qui ne cesse de se renforcer. Pour diverses raisons, les joueurs et les joueuses ont pris conscience de l'importance de cette combinaison entre éducation et football. De plus, les nouvelles générations optimisent mieux leur temps que ne le faisaient les footballeurs de mon époque.
Quoi qu'il en soit, il y a encore beaucoup à faire, et de nombreux coins de la région que nous devons encore cibler. Un rapport de la Banque interaméricaine de développement (BID) publié en 2021 a révélé que seulement six personnes sur dix avant vingt-cinq ans avaient terminé l'école secondaire en Amérique latine. Les chiffres relatifs à l'éducation des footballeurs professionnels de la région sont du même ordre. Que pouvons-nous donc faire pour permettre à ces 40 % de terminer leur éducation secondaire et d'obtenir leur diplôme ?
Au début du mois de mars, la FIFPRO Amérique du Sud a lancé une campagne intitulée « Back to School » (Retour aux études ou Volver a estudiar en espagnol), soutenue par l'Organisation des États ibéro-américains (OEI), le syndicat des joueurs argentins (Agremiados) et la Fédération argentine de football.
Il s'agit d'une campagne de sensibilisation menée par les footballeurs professionnels de la région, qui encourage les joueurs et souligne l'importance de poursuivre ou de reprendre des études.
Elle insiste non seulement sur l'importance d'être éduqué pour la vie après la retraite de footballeur professionnel, mais aussi à des fins strictement sportives. Aujourd'hui, les plus grands entraîneurs du monde considèrent que la clé pour améliorer la prise de décision, créer de l'espace et améliorer le mouvement et les résultats réside en fait dans les compétences mentales. Ils recherchent un développement intellectuel. Et l'éducation renforce précisément cet aspect.
Et puis il y a d'autres facteurs spécifiques à chaque footballeur, à chaque pays, à chaque fédération nationale et à chaque association de joueurs qui ont certainement un impact sur le cas particulier de chaque joueur. Il s'agit d'un contexte multiple dont nous devons tenir compte lorsqu'il s'agit de développer des projets éducatifs dans le domaine du football.
Je me suis donc toujours demandé : que peut-on faire pour promouvoir l'éducation des footballeurs dans une région aussi vaste composée de pays dont les réalités sont si différentes les unes des autres ? La réponse est de se familiariser avec la culture de chaque pays.
Au cours de ma carrière de footballeur, j'ai eu la chance de pouvoir jouer dans des clubs en Argentine, en Colombie, en Bolivie, au Chili, au Venezuela, au Pérou et au Mexique. Cela m'a énormément aidé à connaître leurs cultures. Le hasard a fait que cela revenait à préparer un diplôme universitaire. Si vous prenez le temps d'apprendre de vos coéquipiers leur origine, leur race, ce que le football représente pour eux dans leur région, la représentativité de leur club, la fierté qu'ils éprouvent à se préparer à représenter leur équipe nationale, vous pourrez au final comprendre beaucoup plus profondément leur façon de penser le football et la vie. Et c'est là que vous pouvez vous concentrer sur la meilleure façon d'apporter l'éducation aux joueurs.
Un autre facteur décisif est la valorisation du travail que chacune et chacun fait pour aider les footballeurs à étudier, aussi petite soit cette aide. Lorsque le travail de celles et ceux qui sont à proximité est apprécié, une aura commence à naître et des modèles commencent à apparaître. C'est pourquoi il est essentiel que tous les cours de formation destinés aux footballeurs de la région puissent être dispensés par un collègue professionnel de chaque pays. Il s'agit d'un processus continu de construction multiculturelle dans lequel l'éducation peut être dispensée par un joueur ou une joueuse d'origine uruguayenne, vénézuélienne, chilienne ou colombienne. Nous devons construire un espace dans lequel les footballeurs peuvent éduquer d'autres footballeurs.
Il est parfaitement possible d'aller à l'école et de jouer au football dans un club. Ces histoires de conflits de plannings et autres sont plus une question de mots que de faits.
Depuis 2016, lorsque j'ai été appelé à diriger la Fondation des footballeurs du syndicat argentin Agremiados, je ressens une inspiration qui est la même que celle que j'essaie toujours de transmettre à ceux qui s'associent à des projets sur l'éducation et le football : nous avons entre les mains la possibilité d'offrir à ces joueurs huit heures par jour dans le meilleur cadre possible : la formation et l'école. Et ce qui est enrichissant, ce n'est pas seulement l'activité strictement « académique » mais aussi le côté social. L'éducation et le football peuvent créer l'environnement idéal pour la grande majorité des footballeurs ».