Terrain parfait : comment le gazon aide-t-il les joueurs à atteindre leur potentiel

L’herbe couvre 20 pour cent de la surface de la Terre. Elle retient l’eau. Elle purifie l’air. Que pouvons-nous en apprendre ?

Telle est la question que je me posais lorsque j’ai contacté les gestionnaires des stades de la Bundesliga, l’une des plus grandes compétitions de football au monde. À l’époque, je travaillais dans l’agriculture de précision, et j’avais hâte de rencontrer une communauté qui gère l’herbe au quotidien et qui comprend la science qui se cache derrière. Je cherchais également de nouvelles réponses à de vieilles questions. Comment pouvons-nous vivre de manière durable en tant qu’espèce ? Et que pouvons-nous apprendre des plantes ?

De tout temps, la gestion des 8 000 mètres carrés d’un terrain de football a été un travail à plein temps. Un travail qui demande une main verte, un œil sur la météo et une bonne dose de patience. Mais aujourd’hui, il va aussi de pair avec une responsabilité bien particulière.

La surface de jeu moderne n’est rien d’autre qu’une scène qui accueille les meilleurs athlètes du monde et un drame regardé par des millions de personnes. Ce rectangle vert magique porte les espoirs et les ambitions de tout un club, sans oublier les investissements commerciaux à long terme qui s’y rattachent. Les supporters s’attendent désormais à voir un tapis lumineux et impeccable, une toile de fond parfaite pour servir de scène à un thriller de 90 minutes. Aucune pression, donc, sur les épaules des petites équipes du personnel des stades qui travaillent au gré des intempéries, de l’utilisation croissante des terrains et des délais toujours plus courts.

Lorsque les gestionnaires des stades m’ont répondu, j’ai de suite ressenti qu’ils avaient une préoccupation commune. Tout le monde était occupé, mais chacun avait son mot à dire. Tout le monde avait ses propres techniques, mais chacun était confronté aux mêmes questions : comment soutenir l’équipe et assurer la sécurité des joueurs ? Comment faire pousser quelque chose de durable ? Et comment gérer une douzaine de terrains en une seule journée ?

Personnellement, j’étais plus préoccupé par l’utilisation durable des sols, mais je commençais à percevoir un terrain d’entente.

Tout en surveillant leurs surfaces de jeu, certains gestionnaires des stades griffonnaient leurs tâches sur une douzaine de tableaux blancs différents, un pour chaque terrain. Certains utilisaient des technologies inspirées du secteur du bâtiment, vieilles de près d’un demi-siècle, pour collecter et enregistrer leurs données. Venant d’un monde où l’intelligence artificielle nous aidait à modéliser le climat et à cultiver des plantes de manière plus durable, j’ai commencé à visualiser la façon dont nous pourrions travailler ensemble.

Lorsque, en 2021, j’ai lancé turfcoach, les questions que je me posais étaient un peu plus précises : comment pourrions-nous utiliser la science de l’agriculture et la puissance de l’intelligence artificielle pour créer le terrain de football parfait ? Comment pourrions-nous travailler avec les gestionnaires des stades pour comprendre leur gazon ?

Le gazon, c’est précisément là où tout commence. Là où l’herbe prend racine, là où le footballeur plante ses crampons. Et pour créer un meilleur terrain, nous devons comprendre la façon dont le gazon réagit au monde qui l’entoure, à commencer par le climat. Voilà pourquoi nous utilisons l’intelligence artificielle.

Lorsque nous scannons une surface de jeu, nous procédons de manière non invasive. Personne n’est obligé de couper des bouts de terrain ou de creuser des trous. Nous utilisons l’apprentissage automatique afin de traiter les données que nous collectons, ce qui nous permet alors de créer une image profonde et riche du gazon et de son comportement.

Pour aider les gestionnaires des stades, nous intégrons tous leurs capteurs et outils dans un seul logiciel personnalisé. Nous leur simplifions la vie. Nous rendons la gestion des stades plus durable. Nous réduisons les coûts.

Nous nous considérons comme faisant partie intégrante du sport. Nous souhaitons que les clubs se sentent fiers de leur terrain, après tout, il s’agit ni plus ni moins de leur territoire. Et nous aspirons à ce que les athlètes aient confiance en la surface de jeu et qu’ils en apprécient chaque centimètre.

Lorsque les footballeurs enfilent le maillot de leur club et s’avancent sur le gazon, ne perdons pas de vue qu’ils sont là pour travailler. Et le terrain est précisément leur lieu de travail. Comme tous les travailleurs de n’importe quelle industrie, ils ont droit à la santé et à la sécurité au travail. Mais ils sont également confrontés à un risque bien particulier, celui d’une blessure grave qui menacerait d’écourter leur carrière.

Comment la surface de jeu affecte-t-elle le risque de blessure ? Et comment nos technologies peuvent-elles aider en ce sens ?

En une fraction de seconde, les footballeurs changent de direction et s’engagent dans un sprint, impliquant inéluctablement le gazon sous leurs pieds. Leur vitesse, leurs performances, et bien sûr, le risque de blessure, dépendent de la surface de jeu. Les différentes caractéristiques d’un terrain affectent la façon dont les joueurs activent leurs muscles : à mesure que la pelouse devient plus molle ou plus dure, elle influence leurs courses, leurs changements de direction et leurs mouvements tout au long d’un match.

Ce qui se passe lorsque la chaussure du joueur touche la surface du terrain est crucial. Une importante traction rotationnelle fait plus que doubler le risque de blessure. Elle peut provoquer une déchirure ou une entorse du ligament croisé antérieur (LCA), écartant les joueurs du terrain pendant des mois. N’oublions pas que les footballeuses sont deux à huit fois plus susceptibles de souffrir d’une blessure au LCA que leurs homologues masculins.

Si nous souhaitons réduire les blessures causées par la surface de jeu, nous devons comprendre chaque centimètre carré du gazon. Nos technologies aident précisément les clubs et les joueurs en ce sens. En analysant chaque variable critique, de la dureté de la surface à l’humidité du sol, les joueurs et les entraîneurs peuvent s’adapter rapidement aux conditions changeantes. Si nécessaire, nous pouvons même scanner l’intégralité du terrain quelques minutes seulement avant un match.

Notre objectif à long terme reste le même : créer des terrains uniformes, sur lesquels les joueurs se sentent en confiance sur chaque brin d’herbe.

Si nous pouvons aider les clubs et les joueurs à réduire les blessures, nous commencerons à répondre aux premières grandes questions qui nous ont amenés jusqu’ici, celles-là mêmes que je posais lorsque j’ai rencontré les gestionnaires des stades de la Bundesliga. Comment pouvons-nous créer des surfaces de jeu sûres, durables et adaptées au sport ? Comment pouvons-nous aider les athlètes à devenir la meilleure version d’eux-mêmes ? Et comment pouvons-nous faire rayonner cette vision à travers le monde, afin que chaque région et chaque club puisse un jour bénéficier du terrain parfait ?

Tout commence par le gazon. Si nous voulons que le football soit démocratique, ouvert à tous et durable, les surfaces de jeu se doivent d’être à la hauteur : intelligentes, résilientes et attentives aux besoins humains de chaque joueur. Et c’est précisément ce que l’herbe me raconte.