Cet article fait partie d'une série qui met en lumière l'impact personnel du racisme et de la discrimination dans le jeu du point de vue des joueurs. Pour plus d'informations ou pour télécharger le rapport complet, cliquez ici.
Il existe clairement dans le football, le sport le plus populaire dans mon pays, et la situation a empiré au fil des années. Néanmoins, nous avons aussi une plus grande focalisation sur le problème, une focalisation sur son caractère inacceptable et la nécessité de le combattre chaque jour. Un incident qui m’a fait beaucoup réfléchir s’est produit il y a trois ans. Nous étions allés jouer à Cagliari, lorsque mon coéquipier Blaise Matuidi, un gars vraiment adorable, a subitement commencé à montrer des signes de détresse incroyables, et nous ne pouvions pas le calmer. Il avait entendu des insultes racistes provenant des tribunes, et il était complètement bouleversé.
À l’époque, j’ai trouvé cela difficile à gérer car nous étions en plein match. Il ne restait plus que quelques minutes et c’était un moment décisif de la partie. Mes premières pensées furent « Blaise, calme-toi. Concentre-toi sur le match et on verra ça après ! », et rétrospectivement, j’ai mal agi. Si je revivais ce moment, j’essaierais de l’aider immédiatement au lieu d’attendre la fin du match.
Il aurait probablement mieux valu arrêter le match un peu plus longtemps, parler à l’arbitre et à l’autre équipe pour faire une déclaration claire sur le caractère inacceptable de la situation et pour leur faire comprendre que nous ne pourrions pas continuer dans ces conditions. Cela aurait eu une plus grande visibilité. En l’état, les injures racistes sont presque passées inaperçues, comme s’il s’agissait d’insultes ordinaires, alors que c’était tout le contraire.
Ce problème n’est pas nouveau. Peut-être que nous n’en parlions pas autant par le passé car il y avait une moins bonne compréhension du sujet, mais ces formes de discrimination ne peuvent plus être tolérées dans le monde d’aujourd’hui. Que la discrimination soit liée à la couleur de peau, au racisme, à l’orientation sexuelle ou à toute autre chose, il est question de respect. C’est vraiment incroyable que des gens aient à avoir honte de qui ils sont.
Plus tôt cette saison, lors d’un match entre Napoli et la Fiorentina, nous avons malheureusement assisté à ce qui est peut-être l’affaire de racisme la plus célèbre ayant eu lieu dans un stade en Italie, alors qu’il y en a pourtant un très grand nombre ces dernières années. Lorsque c’est arrivé, j’ai envoyé un message à Kalidou Koulibaly, avec qui j’entretiens une bonne relation. Nous adoptons désormais une posture plus ferme car nous devons faire entendre nos voix sur ces problèmes.
Nous, les joueurs, sommes considérés comme des « objets » qui doivent simplement continuer de jouer au football, car c’est pour ça qu’on nous paye. Mais nous devons prendre position et faire entendre nos voix sur ces problèmes.
Nous savons que nous devons faire quelque chose, mais ce qui est difficile, c’est de savoir comment faire plus. Nous ne pouvons plus attendre, nous ne devons pas attendre que quelque chose arrive à un autre joueur pour réagir. Nous ne devons pas avoir peur d’entrer en action.
En tant que société, nous sommes tous responsables de ce qui arrive et continue d’arriver : tout le monde doit endosser cette responsabilité et montrer qu’un tel comportement est totalement inacceptable.
Je pense toujours qu’en fin de compte ce sont ceux qui élaborent les réglementations et les lois qui ont le plus à faire. Cependant, ces derniers mois, j’ai réfléchi à ce que je pouvais faire pour aider. Lorsqu’un incident discriminatoire se produira à nouveau dans un stade, car même si je suis un optimiste convaincu, je pense que cela arrivera à nouveau, nous devons être assez forts pour prendre position. En tant que footballeurs, nous avons une grande popularité et de l’influence chez les jeunes.
Tout cela implique une certaine responsabilité, nous devons faire plus pour aider les prochaines générations et rendre le monde meilleur.
En se faisant entendre et en prenant une position forte, vous pouvez être critiqué par certains et loué par d’autres. Cela fait partie du jeu, mais ma conscience me dit qu’il est temps que nous prenions cette responsabilité. J’ai les épaules suffisamment larges pour assumer une partie des critiques, même si je pense que sur un tel sujet, les critiques sont réellement mal venues.
Ce que nous devons mettre en lumière, c’est la solidarité, le désire d’écouter les autres et de se serrer les coudes. C’est la base de tout, il faut être assez fort pour aider les prochaines générations à vivre de meilleures vies que les nôtres.