Stephane Dassi Tatan

Stéphane Dassi a attendu sept ans pour toucher son salaire : « Grâce au syndicat, j'ai pu tenir »

L'histoire du joueur

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Stephane Dassi Tatan
  • La carrière de Stéphane Dassi Tatan a été cruellement interrompue à l'âge de 23 ans après une grave blessure.

  • Prometteur en première division camerounaise, il s'est battu pendant sept ans pour que son ancien club lui verse l'argent qui lui était dû

  • « Depuis le début, le SYNAFOC a été à mes côtés », déclare l'ancien arrière droit des New Stars

Cette dernière journée de la saison camerounaise 2015, Stéphane Dassi ne l’oubliera sans doute jamais.

Alors qu'il était sur le point de percer au sein de l'équipe internationale senior, le latéral droit des New Stars a été victime d'une fracture de la mâchoire dans un choc brutal lors d'un match contre l'Union de Douala.

« Leur arrière gauche a joué un une-deux avec un coéquipier. Je l'ai taclé et alors qu'il essayait de m'éviter, son genou a frappé ma mâchoire », raconte Dassi. « Je me suis évanoui et six heures plus tard, je me suis réveillé à l'hôpital avec la mâchoire brisée. Impossible de manger ou de boire, une intervention s’imposait. »

>Pour ne rien arranger, son club l'a abandonné. Dassi a dû attendre dix jours avant d'être opéré. Pendant une période difficile où il a passé plus de six mois avec la mâchoire fermée par un fil, il a été soutenu par sa famille et le syndicat des joueurs.

« Si ce n'était pour ma famille, je pense que j’aurais laissé tomber cette intervention. J’ai été nourri par un tube dans la bouche. Je ne pouvais prendre que de l'eau, du lait et du porridge. Mon régime était trop compliqué, trop cher. 

Heureusement, des amis comme Serge Ngal et Patrick Ngoula, et des hommes au grand cœur comme feu David Mayebi, président du SYNAFOC, et Lucien Mettomo, vice-président, étaient là pour me soutenir. » Aujourd'hui encore, Dassi souffre des séquelles physiques de l'accident.

« J'ai encore des points de suture dans la bouche, car certaines de mes dents bougent encore », ajoute-t-il. « Il me manque neuf dents - j'en ai perdu deux à cause du choc et pendant l'opération, le médecin a dû en arracher sept autres. Je n'arrive toujours pas à mastiquer correctement mes aliments, j'ai régulièrement des problèmes digestifs. »

Cameroun PFA (SYNAFOC)

• Division: Afrique
• Fondation: 1995
• Membre de la FIFPRO depuis: 2001
• Site Web: synafoc.org

Pour ne rien arranger, le président de New Stars, Faustin Domkeu, a refusé de verser à Dassi l'argent qui lui était dû.

« Pendant mes deux saisons à New Stars, j'étais l'arrière droit titulaire. J'ai tout donné à New Stars, mais en retour je n'ai rien reçu du club », a-t-il déclaré.

« J'avais une prime à la signature de 1 600 USD pour deux saisons. Le président m'a donné la moitié en avance et un chèque pour l'autre moitié. Je suis allé à la banque pour encaisser ce chèque et on m'a dit qu'il n'y avait rien sur ce compte. »

Face au refus catégorique de Domkeu de payer à Dassi les salaires impayés et le bonus de signature, le SYNAFOC a porté l'affaire devant la Chambre nationale de résolution des litiges. Le procès a duré près de deux ans.

« En 2017, nous avons gagné notre procès et la CNRL a condamné New Stars à me verser la somme de 7 500 USD à titre de dommages et intérêts. »

Dassi n'a cependant pas immédiatement reçu la somme. Il lui faudra cinq ans pour enfin recevoir l'argent qui lui était dû. « Domkeu avait ouvertement dit qu'il ne me donnerait rien. »

La chance a tourné grâce à Samuel Eto'o

Dassi a commencé à voir sa situation s'améliorer avec la nomination de Samuel Eto'o à la présidence de la Fédération de football (Fecafoot) en décembre 2021.

L'ancienne star du Cameroun, du FC Barcelone et de l'Inter a ordonné aux clubs de respecter les décisions prises par la CNRL, menaçant de reléguer les clubs de deux divisions s'ils ne s'exécutaient pas.

Samuel Eto'o
Samuel Eto'o, président de la FECAFOOT

« J'ai sauté de joie en me disant que j'allais enfin obtenir ce qui m'était dû », raconte Dassi. « Domkeu a demandé à me rencontrer pour un arrangement à l'amiable. »

Dassi a accepté. Accompagné du directeur juridique du syndicat, Daniel Bassega, il a assisté à la réunion au cours de laquelle le président du club a offert 1 950 dollars sur les 7 500 dus.

« C’était insultant. J'ai refusé. Si je pouvais attendre sept ans, je pouvais aussi attendre un peu plus longtemps pour obtenir ce qui m'était légalement dû. »

Le résultat est là. Domkeu est venu avec une nouvelle proposition (4 750 dollars) et Dassi a accepté, clôturant ainsi un chapitre difficile de sa vie.

« Depuis le début, le SYNAFOC a été à mes côtés, ils m'ont aidé, gratuitement », précise-t-il. « Il m'a fallu presque un an pour me remettre de ce choc. Lorsque j'ai voulu revenir au football en 2019, je suis passé pour un joueur à problèmes auprès de tous les clubs auxquels je me suis adressé. Je passais avec succès les essais, mais une fois qu'il s'agissait de signer et qu’ils avaient entendu mon histoire, tous les clubs rechignaient. Aucun ne voulait de moi. »

«Je peux dire que New Stars et Domkeu ont volé ma vie. Ils ont volé ma carrière, ils m'ont tout pris. »

Stephane Dassi Tatan 2
Crédit: SYNAFOC

Dassi travaille désormais comme chauffeur pour une pâtisserie au Cameroun. « Je livre des gâteaux aux commerçants. C'est comme ça que j'essaie de joindre les deux bouts.

C'est grâce au syndicat que j'ai pu tenir le coup. Le simple fait de savoir qu'il existe un toit pour pleurer et être écouté est réconfortant. Je terminerai en invitant tous les footballeurs à faire confiance au SYNAFOC, notre syndicat, et à y adhérer. »