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Aoife Mannion : « Parler permet de diminuer la souffrance »

L'histoire du joueur

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À propos

Aoife Mannion

La défenseuse de Manchester United Aoife Mannion fait partie du groupe de travail sur la santé mentale de la FIFPRO.

Je suis actuellement en rémission d’une nouvelle blessure du ligament croisé antérieur. Avant ma première blessure au ligament croisé antérieur, je pensais que le football ne serait qu’une succession d’événements heureux jusqu’à la retraite. Mais, cette blessure m’a fait changer d’état d’esprit.

Elle a deux facettes : d’un côté, il y a l’incroyable montagne russe d’émotions et, de l’autre, il y a l’interruption brutale de la vie et de la routine footballistiques.

Parfois, il peut être difficile de comprendre qu’en tant que professionnel, le football est ce qui nous fait vivre tous les jours. Bien sûr, pratiquer ce métier est un grand privilège et quelque chose que nous aimons tous faire. Mais lorsqu’une blessure sérieuse survient, c’est un tournant majeur.

C’est ma deuxième blessure au ligament croisé antérieur, et ça a été un peu plus facile cette fois-ci. La première blessure m’a forgé. Traverser ces moments m’a permis de me sentir plus résistante, car maintenant je comprends mieux le processus, la trajectoire et les délais.

Je peux maintenant anticiper les inévitables baisses de moral, et j’ai donc pu discuter avec le staff médical et mettre en place de façon proactive certaines petites choses qui peuvent m’aider à surmonter ces baisses.

Avec cette seconde blessure, j’ai réalisé qu’un grand nombre de mes sentiments vis-à-vis de la blessure sont subjectifs. Par exemple, comment est-il possible de subir deux fois la même blessure, et de me sentir pourtant différente la deuxième fois ?

Est-ce qu’on attend de moi que j’aille voir les filles jouer pendant que je suis blessée ? Ou serait-il meilleur pour ma santé mentale de rester à la maison ? Ce sont des situations que j’ai appris à gérer avec ma première convalescence.

Il est très important de nouer le dialogue autour de la santé mentale, et des choses qui te tirent vers le haut pendant la blessure plus spécifiquement, car parler permet de diminuer la souffrance.

C’est la raison pour laquelle je voulais partager mes expériences, pour qu’une autre joueuse puisse en tirer parti et ne pas avoir à passer par un an de convalescence pour savoir tout ça, comme j’ai eu à le faire.

Je fais partie du groupe de travail sur la santé mentale de la FIFPRO et il y a plusieurs joueuses qui approchent le dialogue autour de la santé mentale avec différentes perspectives. Quelques filles parlent spécifiquement d’un concept émergent : le blues d’après-tournoi.

Certaines disent qu’il est possible de faire le meilleur tournoi de sa vie tout en se sentant au plus mal les mois suivants.

Guide du blues post-tournoi

Même si l’on perçoit tous les choses de manières différentes, j’ai remarqué qu’il y a des éléments communs : nous regardons les mêmes choses, mais avec une perspective légèrement différente.

Pour moi, il est question de parler de ma blessure et de partager mes expériences.

Au cours des dernières années, nous avons réussi à réduire la réticence à parler des problèmes de santé mentale cliniques, comme la dépression et l’anxiété. Mais un autre des éléments positifs qui découle de la réduction de cette réticence est de pouvoir proactivement parler du bien-être, sans avoir nécessairement à attendre que des gens aient sérieusement besoin d’aide pour parler de bien-être.

Dans le football, nous connaissons pour la plupart le concept de burnout. Lors de ma première convalescence, j’ai tenté de la vivre de la même manière que je vis les choses en tant que joueuse : en me dépassant. Mais avoir cette attitude pendant plus de 11 mois, ce n’est pas vraiment intelligent et ça n’aide pas nécessairement.

Dans les réunions du groupe de travail sur la santé mentale, nous avons parlé du concept de blues d’après tournoi : la baisse de moral inattendue que ressentent les joueurs après les tournois.

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Personnellement, je n’ai jamais été impliquée dans un tournoi international sénior. Mais mon avis sur le sujet est alimenté par mes coéquipières et le fait de me demander : « Comment puis-je aider mes coéquipières ? ».

Ce que j’ai remarqué, c’est que nous ne pouvons pas présumer de ce que vit quelqu’un. La meilleure chose à faire, c’est de lui demander ce dont il a besoin.

Pour décompresser suite à des tournois intenses, il semble que du temps de repos soit particulièrement propice. Qu’il s’agisse de jours de repos ici-et-là, être en dehors de l’environnement structuré du football semble aider.

Maintenant, ce n’est pas quelque chose que les footballeurs aiment entendre, parce qu’on veut jouer tout le temps. On veut être dans l’action. Mais cette attitude peut conduire au burnout.

Il est très important de parler de ce dont les joueurs pensent avoir besoin pour atténuer ces sentiments de blues d’après tournoi. Mais il est tout aussi important d’avoir ces discussions avec le staff, car c’est le staff qui définit la routine et la structure dans un environnement de football.