Demitrius Omphroy

Demitrius Omphroy : « J’ai toujours été plus qu’un simple footballeur »

L'histoire du joueur

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À propos

Demitrius Omphroy

Malgré le diagnostic de sclérose en plaques, Demitrius Omphroy (33 ans) a joué pour l'équipe de MLS Toronto FC et a été sélectionné par les Philippines. Il a pris sa retraite au début de sa carrière de footballeur et travaille désormais comme artiste.

J’ai grandi en Californie, mais j’ai été repéré par le Sporting Lisbon et invité dans leur académie à environ 16 ans. Je devais signer un contrat à mes 18 ans, mais peu avant mon anniversaire, ma vision a commencé à se troubler et je suis rentré en Amérique où l’on m’a diagnostiqué une névrite optique. C’était un cauchemar. Tout ce que j’avais essayé d’accomplir tombait à l’eau en l’espace d’une nuit. Quand ma vue s’est améliorée, j’ai décidé de retourner jouer et j’ai été repéré par l’U.C Berkeley qui m’a recruté. J’y ai passé un diplôme d’art majeur. Lors de ma dernière année, j’ai été enrôlé par le Toronto FC.

En jouant à Berkeley, j’ai développé une insensibilité au niveau du pied. Un examen a permis de découvrir que j’avais une MS et que ma vision troublée était une manifestation précoce de la maladie. Tout cela est arrivé si vite et de nulle part. D’une certaine façon, j’étais soulagé, parce que cela m’a aidé à comprendre ce qui m’était arrivé quatre ans auparavant. Mais c’était aussi terrifiant d’être dans l’inconnu, sans savoir ce que cette maladie allait pouvoir me faire. Le pire des scénarios, autre que la mort, est que je finisse dans un fauteuil roulant et que je ne puisse plus jamais jouer.

J’ai joué une année à Toronto et je devais ensuite signer à DC United, mais j’ai refusé ce contrat. J’avais besoin de temps pour me recentrer. J’étais confus par mon diagnostique de MS et je suis allé voir un National MS Advocate Speaker pour parler à d’autres patients et docteurs afin de leur donner de l’espoir, tout en m’éduquant sur la maladie. Au milieu de l’année, j’étais prêt pour retourner sur le terrain au niveau international. J’avais une chance de représenter l’équipe nationale des Philippines et je l’ai saisie sans hésitation. Il ne s’agissait pas de l’une des nations les plus fortes en termes de football, mais c’était une expérience géniale et humble de représenter le pays d’où viennent mes grands-parents.

J’ai pris ma retraite en 2013 à l’âge de 24 ans. Ça n’avait rien à voir avec la MS. En réalité, la MS était plutôt la raison pour laquelle je voulais continuer de jouer. Je voulais me prouver que j’en avais encore la capacité.

Mais je me suis demandé si j’en avais réellement envie. Je me sentais bien plus que simple footballeur et j’ai commencé à me demander ce que j’allais faire après. J’avais toujours touché à tout, mais en fin de compte, je suis resté dans le football parce que c’était ce que j’avais toujours fait. Pourtant, j’étais plein de doutes.

“J’ai fini par basculer vers un rôle créatif. Pour moi, il était question de m’exprimer de différentes manières.”

Même si j’avais signé un contrat, avec un sponsor, et que les gens me connaissaient, ce n’était pas ce qu’il me fallait. Je n’arrêtais pas de me dire : Quand est-ce que je vais finir par vraiment apprécier ça ? Et je crois que ce n’est tout simplement jamais venu. J’ai alors réalisé que je ne voulais pas simplement être footballeur. Je voulais être plus, et j’avais toujours été plus. Je voulais trouver d’autres portes de sortie. Il y avait ce cliché selon lequel les athlètes sont stupides, qu’ils n’ont que faire de l’éducation. Je me suis toujours bien débrouillé en classe, je savais donc que j’étais capable de plus. Je pouvais toujours faire beaucoup plus que ce que je ne faisais.

J’ai fini par basculer vers un rôle créatif. Pour moi, il était question de m’exprimer de différentes manières. L’une d’entre elles était le terrain. L’autre derrière une caméra. Et maintenant, je peins sur des toiles. Certains défis que j’ai relevés pour devenir footballeur se sont présentés à nouveau à moi pour devenir artiste. Beaucoup de gens veulent devenir athlète professionnel, mais en réalité, la plupart n'y parviennent pas. C’est aussi ambitieux que de vouloir devenir artiste. Mais je voulais montrer à tout le monde que j’en étais capable. Et je voulais surtout me le prouver à moi-même.

Demitrius Omphroy 3

J’avais toujours été intéressé par l’art, mais on m’avait dit qu’il n’était pas possible de gagner sa vie en tant qu’artiste, et que si je persévérais, je mènerais une vie d’artiste sans le sou. Même si j’aime terriblement le football, il y a quelque chose dans la création, quelque chose dans le fait d’être un artiste, de peindre et de s’exprimer de cette manière.

Ma mère était une artiste. Elle utilisait les aquarelles et les peintures à l’huile pour peindre principalement des paysages et des natures mortes. Il est difficile de décrire mon style. C’est un peu comme de l’expressionisme, comme du contemporain moderne. Je ne veux pas dire pop ou commercial, mais mon œuvre est au carrefour de ces trois ou quatre styles. On pourrait possiblement la présenter comme de l’expressionisme moderne contemporain.

Beaucoup de recherches ont été faites sur la MS. Pour moi, il est principalement question d’entretenir de bonnes relations avec mon neurologue et de suivre une thérapie médicamenteuse. Il n’y a pas de traitement, mais puisqu’elle a été décelée de façon précoce, je peux avoir une vie gérable avec des épisodes et récidives minimes. En fin de compte, je pense pouvoir vivre une vie relativement dépourvue de symptômes, ce qui n’aurait pas été possible 20 ans plus tôt.